Une porte en bois sculpté sur l'île Saint Louis
Paris, Avril 2019
Une porte en bois sculpté sur l'île Saint Louis
Paris, Avril 2019
On m’appelle souvent pour trouver des solutions à des problème d’adaptation à l’existant, dans des projets d’agencement, d'aménagement intérieur ou d’organisation des espaces. En fait, c’est justement là l’essence même de mon métier de menuisier à Paris
Dans cet appartement de l’Île Saint-Louis à Paris, ma cliente souhaitait utiliser une magnifique porte indienne en bois de palissandre sculpté chinée aux Puces de Saint-Ouen. Sa forme avec arc en plein cintre se prêtait bien à une utilisation dans la partie nuit en souplexe de l’appartement, aménagée dans l’ancienne cave voûtée. Sauf que les passages entre pièces sont de dimensions largement supérieures à la porte.L’idée sera donc de créer un châssis sur bâtit dormant sur lequel viendra se fixer la porte.Je propose de le fabriquer en wengé pour sa teinte très sombre proche du palissandre. Le bâtit viendra se loger dans l’ancienne feuillure bâtée de l’ouverture dans le mur en pierre.La forme complète de la baie est relevée au gabarit. Il me faudra trouver l’arc optimal qui pourra s’intégrer dans la forme relevée. Deux plateaux de wengé bien étoffés et bien secs en 80mm me suffiront. Je les trouve chez Gabriel TAVIOT, scieur a Arthonnay. J’aime bien faire le déplacement en scierie quand mon planning me le permet. Pas seulement pour choisir mes plateaux, mais aussi prendre connaissance des arrivages, des fonds de stock ou encore découvrir de nouvelles essences même si je privilégie les bois indigènes. J’en profite aussi pour aller voir Jean-Gérard VÉDÉ à sa scierie BSV à Rumilly Les Vaudes, ou je prends mon chêne.
Le pré-débit réalisé, je laisse le bois se détendre quelques jours. Le wengé est un bois assez ingrat à travailler: très cassant, ses échardes sont redoutables, et sa dureté met rapidement à mal l’affutage des outils. Il a néanmoins une particularité, sa couleur passe du beige au brun foncé par oxydation à l’air en deux ou trois jours. Mais revenons à la fabrication des arcs en plein cintre de la porte et du bâtit. Ils sont composés de quatre éléments droits assemblés à tenon-mortaise avec un angle de 135° ce qui en fait un demi octogone. L’arc est ensuite dégrossi à la scie à ruban puis usiné à la toupie suivant un demi cercle parfait, sauf la face extérieure du bâtit qui sera usiné suivant la forme du gabarit du relevé pour reproduire exactement l’arc en pierre. Le vantail est en fait une ossature qui viendra recevoir la porte en palissandre sculpté. Pour la rotation, je sélectionne des paumelles renforcées en acier pour supporter l’ensemble, noires pour bien s’intégrer à l’ouvrage.
La pose aurait pu être une simple formalité mais le sol en mosaïque de marbre noir demandait de telles précautions que nous avons du le recouvrir d’une couche de couverture puis d’un polyane et travailler en chaussettes. Chaque déplacement, chaque présentation des ouvrages, chaque utilisation d'outil se faisaient avec d’infimes précautions, situation que nous rencontrons toutes les fois que nous intervenons dans des lieux prestigieux.
Il nous a fallu près de cinq heures d’assemblages, d’ajustements et de fixation pour obtenir le résultat souhaité et les félicitations de notre cliente.On notera que cette porte vient fermer la salle de bain! J’aime ces projets atypiques de menuiserie qui m’obligent à créer, inventer, imaginer ou encore concevoir des ouvrages uniques amenés à durer dans le temps.